Les Echos, 24 janvier 2025.
Ce n’est pas l’ambiance des grands jours au World Economic Forum cette année. Face au rouleau compresseur américain, banquiers et dirigeants de grandes entreprises font le constat amer de l’impuissance des Européens à riposter. […] Est-ce la fin d’un monde auquel on a assisté à Davos avec la 55e édition du Forum économique mondial ? […] Les banques européennes ne sont pas les seules à se désespérer de Bruxelles. Les grands industriels ne mâchent pas leurs mots face à ce qu’ils considèrent comme la folie technocratique de l’Europe. […] Ursula von der Leyen, présente à Davos, ne les a pas rassurés. « En gros, elle nous demande d’être résilients… c’est-à-dire de faire le dos rond face aux Américains et aux Chinois. Mais la résilience, c’est la stagnation, c’est la mort lente. Aucune économie ne peut se développer avec ce leitmotiv. L’Europe est suicidaire », pouvait-on entendre à la sortie du discours de la présidente de la Commission. […] Les grands patrons français et européens se désolent de la politique européenne, mais ils sont aussi de plus en plus critiques et véhéments contre leurs gouvernements nationaux, inefficaces et surendettés. « N’importe quel président de la République ou Premier ministre serait viré sur-le-champ par son board s’il présentait un budget aussi déséquilibré et s’il était surtout incapable de s’engager et de respecter ses KPI », explique un grand patron français. […] Le discours agressif, pro business, dérégulateur, nationaliste, protectionniste de Donald Trump, malgré ses contradictions et ses incertitudes, apparaît donc comme l’antidote au surplace européen. […] L’optimisme et l’envie, l’enthousiasme du monde qui vient, désormais partagé par les pays émergents, c’est ce qui semble manquer le plus désormais à l’esprit de Davos. Même François Villeroy de Galhau, le gouverneur de la Banque de France, partage cette impression : « Mario Draghi évoque une lente agonie de l’Europe. Je préfère parler d’un long sommeil. »